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Publié : 8 septembre 2010

Paul Roustan, écrivain provençal

Paul Roustan est fêté à Puyméras ce 11 septembre, c’est l’occasion de revenir sur des aspects principaux de sa vie. Un livret sur son action est également disponible auprès de l’association Puyméras mon village.

Paul Roustan

Il naît en 1859 à Puyméras dans une famille nombreuse et pauvre.
Son père était menuisier, à côté de son atelier il implante une salle de café, plus tard de restaurant et un débit de tabacs. A ce moment il y a six enfants dans la famille, Paul Roustan a douze ans.
Il décrit son père comme un homme travailleur qui égayait les veillées d’hiver par des chants de l’ancien testament.
Photographie (1868) à 9 ans, il accompagne ses parents Victor et Baptistine pour une visite à son frère Amédée (23 ans) qui enseigne à Avignon rue des Ortolans. Il dit qu’il fait son premier voyage en train.
Son frère aîné, Florimond, (25 ans) est menuisier comme son père (53 ans).

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Frise Temps Paul Roustan

Les réussites

La littérature : Des pièces représentées plus de deux cents fois ;
Succès quantitatif et qualitatif avec une œuvre couronnée deux fois par les jeux floraux du Félibrige, la cigale d’or de Majoral en 1922, la nomination d’officier d’Académie 1929. (Palmes Académiques : Décernées par le ministre de l’Instruction publique, récompense des services rendus à l’enseignement, accessibles aux personnels de l’Enseignement privé, loi Falloux.)
Homme de terrain qui a le sens de communication : animation théâtrale auprès de ses élèves, professeur très apprécié, nombreux témoignages d’amitié de ses anciens élèves qui continuent à jouer ses pièces.
Sens de la famille : déplacements très fréquents pour les rencontrer.
Méticuleux et organisé : Il fait relier toutes les lettres, colle dans les reliures les articles de journaux et affiches des représentations…
Le succès de Paul Roustan tient au fait qu’il est très exigeant mais aussi qu’il sait apprécier l’aide des autres : Les articles de journaux reconnaissent la qualité des représentations à tous les niveaux : on découvre à travers ses lettres de grandes qualités humaines, il ne manque pas de remercier par un petit poème une attention qu’on a eue pour lui. Il a le soin aussi bien des grandes réalisations que des petits détails.
Son souvenir reste fort à Avignon où une plaque en son honneur a été posée sur l’ensemble éducatif de La Salle à Avignon par l’ancien directeur Jean-Louis Archet le 4 avril 2003.
Egalement il a marqué fortement Alès où son ami Jan Castagno déclare au moment de son départ qu’il sera regretté non seulement par les membres de l’école félibréenne de la Tabo mais aussi par la plus grande partie des habitants d’Alès. (Revue Cacalaca N° 137 du 15 octobre 1932 p.1)

Les défis et épreuves

La guerre de 1870 a un retentissement important dans la famille : Son père meurt en 1871 à 56 ans des suites d’une maladie contractée à la guerre. (Paul Roustan a 12 ans) Il parvient à poursuivre ses études probablement grâce à la solidarité de ses deux grands frères Amédée et Amand qui enseignent dans les écoles chrétiennes.
Paul Roustan devient frère des écoles chrétiennes ; mais plusieurs des écoles où il enseigne sont laïcisées à partir de 1907 ; la congrégation des frères est dissoute.
Pendant la guerre de 1914 il continue à assurer l’enseignement à l’école Fléchier à Alès.
Paul Roustan est arrivé à concilier beaucoup de paradoxes

C’est un homme déterminé, mais flexible aussi et très affable, d’un esprit très ouvert ce qui lui permet de réussir dans des situations paradoxales : Un frère qui ne porte plus l’habit, il développe la pratique du provençal alors qu’il est interdit de le parler dans les écoles. Il enseignant catholique dans des Cévennes marquées par le protestantisme. Il écrit et parle le provençal dans les Cévennes de dialecte languedocien, quoique la langue soit assez proche.
Il reçoit en tant qu’enseignant d’une école libre les Palmes académiques du ministère de l’instruction publique pour son action au niveau du provençal alors que normalement on ne doit pas la parler dans les écoles !

Puyméras chez Paul Roustan

Dans ses poèmes

Il parle de quelques amis des environs qui sont le curé de Puyméras et le curé de Saint Romain.
Ma tourre (Texte présenté dans l’exposition de Puyméras et présent dans le livret édité par l’association Puyméras Mon Village, "Paul ROustan, Félibre de Coumbo-malo, page 38.)
Remembranço ( poème) Manuscrit Tome 1 p265 C03 voir le texte dans le document joint en fin d’article.

1896 : Inauguration de l’école catholique de Puyméras.
Puyméras dans Lou barrulet (1912-1929)


1912
 : Il commence d’écrire Lou Barrulet. Le correspondant à Puyméras est Zoé, (née en 1847) la grande sœur de Paul Roustan, épouse Bouquet, ou sa fille, Léoncie. (née en 1872)
1929 (octobre) Fin de nos exemplaires du Barrulet

On trouve des nouvelles dans le Barrulet écrit à partir de 1912. C’est une lettre qui « tourne » et a neuf destinations, à Alès, Puyméras (Zoé épouse de Alphonse Bouquet, sa fille Léoncie) Avignon (Rose fille de Zoé et Germain) Saint Rémy (Son frère Amand rejoint par Amédée (1912) Lyon (Léon fils de Florimond, Anne fille de Francisque petite fille de Florimond) Arles (Marguerite, fille de Louis, petite fille de Zoé, et Sidonie, femme de Francisque) Marseille (Rose fille de Zoé et Marguerite fille de Francisque) Saint Etienne (Renée, Raphaël) Annonay (Solange femme de Léon, fils de Florimond, et sa fille Gabrielle).
Ces lettres forment 2 volumes reliés par Paul Roustan.

Paul Roustan manifeste un caractère exigeant mais fait toujours prouve de compassion. Il exhorte régulièrement ses correspondants à la régularité… mais on apprend parfois que le barrulet fait son tour en 49 jours, avec un record de lenteur à deux mois même !
Lettre Avec un poème p110 N° 81 Tome 2 le 12 mars 1920

Moun paure barrulet la pereso t’empougno !
Pèr acaba ta courso as més quaranto jour !
Au founs di tiradou, segur, sènso vergougno,
T’endormes inchaiènt et fas de long miejour.
Escouto aquéu counsèu que iéu te quite :
Gardo-te de la grèvo ! Acò’s un marrit flèu.
Laisso-la faire is autre ! Adiéu e filo vite…
En tóuti, de poutoun… L’óublides pas, moun bèu.

Lettre de janvier 1920 N°79 Les souhaits envoyés à tous les membres de la famille : Par une seule lettre il envoie ses souhaits à 25 personnes.

Février 1912
Tome 1 Lecture p 109 110 Résumé des lettres 1912 : Banquet en l’honneur des vétérans de 1890

Dicton : Le jour de la chandeleur si le loup ne fait pas sécher sa paille il pleuvra pendant quarante jours. P 134

1913 14 mai On restaure la chapelle de St Georges.

La Joucoundo en est à sa 16e représentation, elle a coûté 150 francs et a rapporté 202 francs en ventes et droits.

1914 21 février
Le parrain De Vilhet fait une culbute sans gravité sur sa jardinière.
21 avril Vente de livres à Tarascon, Beaucaire, Saint-Rémy.

1915 24 février
Décès de son frère Amédée (né en 1845, 70 ans)

(1920) La procession de St Georges après laquelle on mange des brassadeaux trempés dans le vin blanc. Bouquet réussit toujours bien son vin. Des voleurs chez Léopold de Vilhet,
Accident de M. Plantevin avec son cheval, maladies…

17 juillet 1921 vague de chaleur, beaucoup d’attentats contre les trains.

19 août 1921 Amand quitte Saint Rémy, il va représenter une école et aider un peu l’enseignante, il logera dans la cure de Chambonas en Ardèche.

Septembre 1921 Paul Roustan souffre des hivers rigoureux, parle d’une bronchite très longue. Paul Roustan a des rhumatismes au pied et fait une cure à Propiac en début de septembre 1921.
Paul Roustan à travers le barrulet

Si Paul Roustan semble d’humeur égale et philosophe on devine au détour d’une phrase qu’il a pu avoir un passage difficile dans une lettre du 9 juin 1912 Léoncie écrit : « Nous voyons avec plaisir que notre bon oncle a enfin retrouvé sa grande tranquillité d’esprit qu’il avait perdue à Avignon. »

Le 9 août 1913
Le pensionnat d’Avignon a été vendu à la ville pour 15500 Francs. « C’est triste ! Voilà un gros lambeau de mon cœur qui s’en va à la dérive. » écrit Paul Roustan.

21 juillet 1912
à Amédée « Qui t’empêche de te reposer sous les platanes de St Rémy ? Laisse Avignon. La bile est mauvaise conseillère. »

Les étapes de la vie de Paul Roustan

1875 : (16 ans) Il commence à enseigner à Aubignan,
Il va ensuite à Nîmes mais les écoles sont laïcisées.

1882-1897
Enseigne au pensionnat chrétien d’Avignon (Se trouvait rue Joseph Vernet jusque dans les années 1940) sous le nom de Frère Théophile.
Pendant 15 ans Il est chargé d’organiser au pensionnat des séances récréatives, et de faire jouer aux élèves des pièces de théâtre deux à trois fois par an. Il s’intéresse assidûment au provençal et tout naturellement il commence d’écrire une pièce pour être représentée par ses élèves : Lou sèti de Veisoun
1883 : Lou sèti de Veisoun. Jouée pour la première fois le 22 décembre 1883 au pensionnat d’Avignon.
1884 : Paul Roustan s’inscrit au Félibrige
Pièce Lou sèti de Veisoun Couronnée au jeux floraux du Félibrige d’Hyères en 1885. Publiée en 1887. Imprimerie Aubanel. Pièce inspirée de la tradition orale.
Reçoit une lettre de félicitations de Frédéric Mistral : « Avés trouba dins l’estrambord de vosto amo bello, lou grand estile e li crid esmougu de la tragèdi, e vosto lengo armouniouso e claro s’enauro proun souvènt i bèlli cimo felibrenco. » Maiano de 5 janvié 1887.

En 1892 polémique dans le Félibrige, suite à l’élection du capoulié Félix Gras. Démission de 112 félibres. Paul Roustan s’engage derrière le Capoulié et soutient les idées fédéralistes.
Lettre à Henri Bouvet, du 29 octobre (P. 13) citée par Anfos Martin, Jules Cassini.
http://sites.univ-provence.fr/tresoc/libre/integral/libr0641.pdf

Me parlas de Savinien e dóu Paire Savié de Fourviero ; vous afourtisse qu’éli tambèn voudrien lou Federalisme e devès saché que forço catouli en visto cridon emé resoun contro l’unitarisme que nous aclapo...
(1) Vous me parlez de Savinien et du Père Xavier de Fourvières ; je vous assure qu’eux aussi voudraient le fédéralisme, et vous devez savoir que beaucoup de catholiques en vue protestent avec raison contre l’unitarisme qui nous accable...

1895 Bernassoun e li rèi, pastorale http://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k57841541.image.f2.langFR

Imprimée en 1895 chez Seguin à Avignon. Jouée de nombreuses fois : Pour la première fois par les élèves des deux premières classes du pensionnat 10 janvier 1895.
On signale que de par sa position l’auteur doit garder l’anonymat.
Anecdotes

Joué par exemple à Graveson dans la salle du café de l’Univers le mardi 24 décembre. En bas de l’affiche : « La commission prévient le public que la salle sera chauffée si le froid était trop vif. »
Jouée par plusieurs troupes différentes à Carpentras, Saint-Rémy… Interprétée par la jeunesse catholique de Valréas en 1900, rejouée en 1902 à Beaucaire par d’anciens élèves de l’école des frères de Beaucaire. « Salle chauffée et éclairée. » ; A Beaucaire 800 personnes assistent à la pièce. Mistral invité s’excuse et répond : « Siéu assegura d’avanço que li bèucairen aplaudiran ferme vosto obro. »
Carpentras, Apt, Marseille…
Il dit dans une des dernières pièces, La Fiho dou rèi Reinié à ses élèves anciens et actuels : « La representrarés emé gàubi coume mai de dous cènt cop i’avés representa moun sèti de Veisoun, ma pastouralo Bernassoun o ma joucoundo de Zibo-Zoubo.

1897-1902 : ?
1902- 1904 Séjour à Beaucaire où il dirige à partir de 1903 l’établissement.

A partir de 1906
la sécularisation
Émile Combes (ministre de l’Education) interdit l’enseignement aux congrégations ( loi du 7 juillet 1904). De plus, suite à la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, (3 juillet 1905 : votée, appliquée théoriquement au 1er janvier 1906, en réalité en 1907) la congrégation des frères et dissoute et la majorité de leurs établissements sont fermés. Les frères soit s’exilent : notamment aux Baléares, soit continuent à respecter leur vœu monacal en portant l’habit civil. C’est le cas de Paul Roustan.

1905- 1907 A Arles. Il devient collaborateur de son frère aîné qui dirige l’école d’Arles mais l’établissement est également dissout. Il est encore à Arles en 1906 au moment où meurt sa mère en avril 1906. (malade en 1907 à Arles son frère vient le soigner)

1908-1909 Il revient au pensionnat d’Avignon.

1911 (octobre ?) au pensionnat Fléchier à Alès et y reste jusqu’en 1932.
L’école Fléchier est un ancien pensionnat Catholique qui a été racheté par les familles, et qui existe toujours ayant pris aujourd’hui une orientation technique.

Il est le correcteur des livres et revues imprimées par Jan Castagno pour tout ce qui concerne la langue. (plus particulièrement l’écriture)
Dins "la Mielado", recuei de nouvello cevenolo de Jan castagno (Alès, 1919), dedicaço : "A Moussu Paul ROUSTAN, proufessou, autour de "La Pichoto Istòri de la Literaturo d’Oc", moun mèstre e moun ami, felibre afouga, tant saberu que moudèste : En gramaci de sas liçous de lengo".

1912, 1922 La Joucoundo de Zibo-Zoubo.
1921 Représentée trois fois à Alès, une fois à Quissac, en 1921 toujours on lui demande l’autorisation de la jouer une fois à Malaucène…

1914 : Pichòto istòri de la literaturo d’O.

1920 Cabiscòu de l’escolo de la Tabò jusqu’en 1922 soit 2 ans. Il permet une transisiton et insuffle une nouvelle dynamique. Pau Roustan, proufessour, mèstre en Gai sabé, carr. Florian, 2, Alès

1922 Cigale d’or de Majoral décernée à Cannes pour la Santo Estello de Pentecôte. On fête sa Cigale d’or à Alès le 8 juillet. Il est remplacé comme Cabiscòu par Jouse de Font Vierano, et souto Cabiscòu Jan Castagno.

1924 La fiho dóu rèi Reinié, traduit du Danois. Imprimerie Julien Brabo (dit Jan Castagno) à Alès.

Autres livres :
Estèr, oratorio (traduction) Un escaufèstre à Berin-Beròu. Un biòu escapa Comédie en 1 acte.
Ces livres sont restés à l’état de manuscrits.
En 1930 15000 personnes assistent aux fêtes du centenaire de Mistral à Alès. (Revue Cacalaca N°127 p.3)

Octobre 1932 Il se retire ensuite à la maison de retraite des frères à Avignon rue ND des 7 douleurs.

Il meurt à Avignon le 25 décembre 1938.
Le capoulié Frédéric Mistral neveu lui rend un dernier hommage. Il est inhumé au cimetière Saint Véran d’Avignon dans la tombre collective des frères des Ecoles chrétiennes.

A consulter : Article sur Paul Roustan par Jan-Glaude Roux dans la revue Li nouvello de Prouvènço N°159, septembre 2010, p.38-39.